jeudi 22 décembre 2016

A chaud... de la colère à comment renforcer les stigmates par l'humour ?

De la colère.

Hier, France Inter ''fêtait'' les 10 ans des enfants du canal qui est une association qui lutte contre le mal-logement. Les directs se passaient place de la République devant un auditoire de "mal-logés" semble-t-il. L'association en question, pour son anniversaire distribuait aux sans-abris des postes de radios/lampe de poche à dynamo et énergie solaire... Or, comme le disait très justement Augustin Legrand, fondateur des enfants de don Quichotte,  "distribuer des radios, c'est pour distribuer la parole mais ça ne sert à rien, on le sait" (matinale de Cohen).
"Mettez-vous au chaud Léa Salamé" concluait maladroitement Cohen à 7h50. Effectivement ça devait cailler grave place de la République à l'aube de cet anniversaire, d'autant plus quand on est enceinte. Une chambre d'hôtel de libre où il est interdit de manger suffirait peut-être à satisfaire un besoin de logement, un besoin de foyer ? Malheureuse illusion de la naissance du sentiment d'être logé.


Au renforcement des stigmates.

Et puis la goutte d'eau qui fait déborder le vase de la colère c'est l'émission de Vanhoenacker. Emission que j'apprécie pour son humour décalé mais qui hier était trop décalé. "Peut-on rire de tout ?" était proposé comme éternel sujet de conversation à l'invité (Jérémy Ferrari). Sa réponse était intéressante car il parvenait à dire que des sujets graves comme les attentats de Paris n'étaient pas drôles pour une victime de ces attentats. Alors que selon lui les "handicapés" trouveraient très drôle les sketchs les concernant en tant qu'objet de rire. Paradoxe à part, il me semble qu'il y ait un niveau différent d'impact de l'humour entre je fais un sketch sur les stéréotypes du handicap (finalement ça ne concerne personne en particulier) et je fais un sketch sur une victime des attentats de Paris et sur ce que cette victime bien ciblée à vécu précisément et personnellement (finalement ça concerne directement une personne qui n'est certes pas cité mais qui, elle et sa famille se reconnaissent). Être personnellement l'objet du rire n'est pas drôle et il me semble que la catharsis de l'humour trouve ses limites dans cette condition précise car elle remet à mal un équilibre psychique déjà traumatisé. Je m'égare...

Et quand je ne sais plus quel intervenant de l'émission (Vizorek ou Meurice) interpellait le public pour chauffer la salle en leur balançant "comment ça va les pauvres ?" et ce, à plusieurs reprises, ce fut le comble du mauvais goût.
Rappelons-nous du modèle processus de précarisation de Paugam (1991) : "la précarité est une fragilisation sociale qui se déploie sur un continuum allant de l’intégration à l’exclusion." La première étape de ce processus est la stigmatisation, "moment où la personne accepte d’être désignée comme pauvre par les institutions officielles". C'est donc se définir comme pauvre, en porter la marque à l'échelle de la société pour ne plus être reconnu de prime abord comme un être humain, un citoyen. C'est une étape de la mise en écart et se faire interpeller à la radio en tant que pauvre vient renforcer ce stigmate et je m'interroge de comment le public a pu vivre cela.

Si je devais résumer ce qui est dit (communiqué) ça serait :
Je t'offre une radio, ça ne sert à rien sauf à distribuer la parole, une parole stigmatisante pour ne pas que tu (on ne te vouvoies plus de toute manière) oublies ce que tu es devenu et ce que tu vas malheureusement rester. Et les pauvres ne sont pauvres qu'à Noël, ça se sait ça !

Le mauvais goût et les maladresses médiatiques ont encore un bel avenir devant eux.

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Paugam, S. (1991). La disqualification sociale. PUF, Quadrige.

mardi 20 décembre 2016

Gastrostomie et trouble anxieux (la suite)

Je fais suite à mon précédent article sur la dame anxieuse. Pour faire court, le symptôme d'anxiété s'est résorbé. Par contre difficile d'identifier le facteur de réussite parmi tout ce qui s'est mis en place pour elle :
  • facteur environnementaux :
    • une nouvelle voisine de chambre foncièrement extravertie qui la considère comme la sœur de sa belle-mère
    • une autre voisine de chambre pour qui la dame avait travaillé dans sa jeunesse
    • une distribution rassurante des poches de gastrostomies
  • facteur psychothérapeutique :
    • une séance d'hypnothérapie
    • des séances de soutien psychothérapeutique dans un environnement bruyant afin de stimuler son contrôle attentionnel, librement inspiré des travaux de Robinson et al. (2016 ; en cliquant sur ce lien)
  • facteur médicamenteux :
    • un anxiolytique en systématique
Aujourd'hui, elle est plus détendue, souriante et élabore spontanément de petits projets afin d'améliorer son quotidien ce qui est significativement remarquable !

Tout cela, c'est la forme. Finalement nous avons réduit le trouble du comportement perturbateur mais le fond d'anxiété, lui, est toujours là et bien ancré.

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Robinson, O. J., Krimsky, M., Lieberman, L., Vytal, K., Ernst, M., & Grillon, C. (2016). Anxiety-potentiated amygdala–medial frontal coupling and attentional control. Translational Psychiatry (2016) 6, e833; doi:10.1038/tp.2016.105.

Se faire violence dans le soin

Je rebondis sur un article de Ciccone (2009) intitulé "Faire violence sous prétexte de soigner". Article parcouru pour étayer une situation où l'équipe risque l'épuisement face à un patient désinhibé, impulsif, agressif et autoritaire avec dans ses antécédents une bipolarité et une personnalité paranoïaque. Je serai presque tenté de renommer l'article avec un réflecteur de la troisième personne mis entre parenthèse : "(Se) faire violence sous prétexte de soigner."

"Ce n'est plus un humain, on dirait un animal... Je n'en peux plus, il va nous rendre folle."

L'autre n'existe plus. Seule l'expression de la pathologie est perçue.

Il faudrait très certainement y voir l'affect de honte des soignants que Ciccone origine lors de la rencontre avec la pathologie. D'après lui, la honte provient d'une confrontation entre l'horreur du handicap, de son inhumanité et de l'idéal professionnel. Comme M. est opposant ou autoritaire, c'est selon, il est presque impossible de le satisfaire pleinement et par là même pour les soignants d'être satisfaits de leur soin. Le risque dans ce cas est de voir émerger la haine et la rétorsion du soignant à l'égard de cet homme. Je crains que certains membre de l'équipe non qualifiés aient déjà basculé dans la rétorsion pour répondre à la violence que fait vivre le patient.

Une force est à souligner toutefois, l'équipe est solidaire et est dans la recherche de l'élaboration car me sollicite régulièrement. "Seule l'élaboration suffisante de la haine permet que la réponse du soignant soit une réponse aux besoins du patient" (Ciccone, 2009). D'où la nécessité, même en EHPAD (annexe de la gériatrie), d'une supervision d'équipe régulière.
Il faut dire que Ciccone était là au bon moment car je commençais à être moi-même sidéré par l'effroi et l'impossible soin à donner.


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Arcimboldo, G. (1573). L'hiver [huile sur toile]. Paris: musée du Louvre.
Ciccolo, A. (2009). Faire violence sous prétexte de soigner. In S. Korff-Sausse (ed) La vie psychique des personnes handicapées (pp 197-205). érès

mercredi 30 novembre 2016

Cognition de la spiritualité

Il s'agit ici d'un article-bouteille à la mer car une colle m'a été posée et je n'ai pas été foutu d'y répondre... c'est le but de la colle quoique l'intention initiale du colleur n'était pas de me coller.


Où se situe la spiritualité sur le plan cognitif ? Les capacités cognitives rattachées aux croyances sont-elles maintenues dans le vieillissement pathologique ?

Je reformulerai la première question en : "A quelles fonctions cognitives pourraient bien se rattacher la croyance ?" Spontanément je répondrai aux raisonnement (mémoire de travail et système de contrôle exécutif), émotion, praxie, mémoire épisodique et procédurale, langage et compréhension, compétence sociale et empathie... Je répondrai que c'est une capacité qui fait appel à l'ensemble du système cognitif. Pour étayer cette réflexion, j'ai cherché des articles scientifiques sur la cognition de la spiritualité sans trop de succès. Et puis dans ce type de recherche on a vite fait de tomber sur des sites douteux. D'autant plus que les bouquins en ma possession n'évoque pas cette problématique. Il est très succinctement survolé la notion d'hyper-religiosité que je crois associée à la psychose et au syndrome dysexécutif cognitif. La paléontologie fait le constat que la spiritualité est toute particulièrement associée au développement cortical de l'espèce humaine (conscience de la mort, rites funéraires)... sauf que les éléphants, certains oiseaux, les fourmis, ont elles aussi des comportements que je qualifierais faussement d'anthropomorphe lors des rites funéraires qui leur sont propre. Faussement anthropomorphe car pourquoi attribuer ces compétences à l'humanité alors qu'on les retrouve dans d'autres espèces ? Je m'égare.

Quant à la seconde question... Je n'en sais rien et serais tenté de dire que les habitudes de vie-rituels perdurent tout comme les croyances. Ce qui importe est ce qui fait sens à la personne âgée même sévèrement démente.

Si vous avez des pistes de réflexions sérieuses à apporter, je vous laisse commenter et apprécierais un échange sur cette colle.

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Friedrich, C. D. (vers 1834). Les étapes de la vie [huile sur toile]. Leipzig: Museum der bildenden Künste.

vendredi 11 novembre 2016

Le deuil et l'oubli

"Il faudrait faire un bilan mémoire à M. C car il ne souvient plus qu'hier son épouse est décédée."

Je ne cacherai pas mon agacement quant à cette demande que j'ai déclinée. Il en va de soi. D'autant plus que la famille de cet homme a fait le choix de l'écarter des cérémonies funéraires. Mis de côté le bilan neuropsy, je me suis empressé de m'assurer que le travail de deuil puisse se réaliser chez lui. A mon grand étonnement, il a spontanément exprimé que son épouse était partie.

"Elle est où votre épouse ?
- Ben, elle est au cimetière !"

La situation me paraissait plus sereine, il se souvenait ! Pourquoi plus sereine ?
Ce qui est nécessaire pour débuter le travail de deuil est de se confronter à la réalité de la perte. Comment ancrer le réel dans l'imaginaire ? Il faut assister à la présentation du corps du défunt pour qu'un constat se fasse. Il faut assister aux cérémonies, la mise en bière et l'inhumation apparaissent les plus essentielles.

Il est une erreur naturellement bienveillante de préserver les plus anciens ou les plus jeunes de cette réalité. La crainte principale d'un tel comportement de protection est une appréhension des réactions que pourrait manifester celui qui est considéré comme le plus fragile.
C'est une erreur sur plusieurs points. La mort fait partie intégrante de la vie, c'est justement la présence de la mort qui constitue un moteur de la vie. Par exemple la cérémonie du baptême emploie l'eau comme médium. La symbolique de l'eau renvoie à la vie comme à la mort. Il ne faut pas oublier non plus que les plus anciens en ont vu d'autres (occupation militaire, migration, guerre, stress, morts violentes, conditions de vie difficile, travail non déclaré, agressions en tous genre, hyper conformité sociale etc.). Ils sont bien plus armés et bien plus sereins à l'idée de la mort que ce qu'on pourrait penser ! Quant aux plus jeunes, ils peuvent seulement penser la mort comme une absence ou un départ définitif entre 5 et 10. La position restera fondamentalement la même c'est à dire d'inclure les enfants aux rites funéraires mais un accompagnement psychologique est nécessaire sans exception ! Pour simplement le soutenir dans l'absence du défunt, que l'enfant ne soit pas seul avec des émotions qu'il pourrait avoir du mal à nommer.

Dire qu'untel est parti sans s'assurer du sens porté au verbe partir ne suffit pas car dans si l'on part, c'est pour revenir. Et là peut s'enclencher une cascade de troubles (opposition, dépression, solitude, abandon familial qui ne peut plus supporter le regard du survivant qui réclame le défunt et à qui l'on cache qu'il est décédé).
"Mais pourquoi ne revient-il pas ?"
"Qu'ai-je fait ?"
"Je l'attend, elle doit revenir."


L'homme qui se souvenait pouvait donc enclencher un travail de deuil car il avait fait confiance aux discours familial. Une chance pour lui ! Car un deuil bloqué ou compliqué ou pathologique ou impossible à réaliser est d'une autre paire de manche...

D'autrefois la réalité est trompeuse et très embarrassante... :
"On dirait qu'elle est morte.
-  Euh... elle n'est pas morte... elle dort. Voyez comme elle respire.
- C'est con hein mais les morts se ressemblent tous !"
Preuve que l'on peut rire de tout à tous les âges...

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Friant, E. (1888). La Toussaint. Nancy: Musée des beaux arts.
Millais, J. E. (1851-1852). Ophélie. Londres: Tate Britain.
Waterhouse, J.-W. (1888). The lady of Shalott.  Londres: Tate Britain.

jeudi 6 octobre 2016

La place du psychologue en institution

La place du psychologue dans l'institution est une question récurrente et éthique à laquelle je me soumets particulièrement en ce moment. Suite à des difficultés exposées en supervision et ayant trait à la demande institutionnelle et au risque d'y être instrumentalisé, j'ai trouvé dans un second temps un excellent support à la pratique. Il s'agit de l'article de Boyer-Vidal & Gremillet (2016) paru dans le dernier numéro du Journal des Psychologue (n°341). Cet article combiné aux éclairages de la supervision me parle particulièrement. Il y est question de la place que doit créer le psychologue en tenant compte de sa fiche de poste, des attentes du N+1 (le directeur), de la représentation du psychologue chez les équipes, chez les patients, du code de déontologie (qui soit dit en passant n'est pas légiféré) et de la ''méthode'' du praticien.


"C'est le bordel avec vous ! Vous n'êtes ni un soignant, ni un administratif !"
 

La place du psychologue est flottante d'où la difficulté de saisir ce professionnel mais aussi pour le psychologue lui-même de saisir la place la plus juste au moment donné en tenant compte des enjeux institutionnels dans lesquels il est embarqué. Ce n'est que le début mais aussi le but du jeu étant donné l'état actuel des choses.

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Boyer-Vidal, B. & Gremillet, C. (2016). Psychologue en institution: une place à créer. Le Journal des Psychologue (341).
Aïvazovski, I. (1852). Paysage côtier avec des pêcheurs et des navires à voiles. Londres.

dimanche 25 septembre 2016

Gastrostomie et trouble anxieux

Une gastrostomie datant de plus d'une décennie sur une patiente âgée. Cette acte chirurgical n'a pas été acceptée par celle-ci :

"Je croyais que ce serait provisoire. Si j'avais su avant l'opération que je devais porter des poches tous les jours, j'aurai refusé. Le chirurgien m'a dit que ce serait provisoire. J'aurai dû refuser et j'aurai préféré mourir que d'avoir à supporter ça."


Elle souffre d'un trouble anxieux généralisé qui se manifeste, pour ce qui est des symptômes signifiant, par une irritabilité, une tension musculaire, un trouble du sommeil et, pour ce qui relève de la clinique, des obsessions de vérifications, de nettoyage, une obnubilation de la pensée sur l'orifice artificiel, les poches et les sécrétions qui en sortent. Elle appréhende les émanations d'odeurs et a une consommation de poche démesurée car elle les change au moindre gonflement, à la moindre sécrétion.

"Je ne veux pas qu'on sente, j'ai peur que ça sente mauvais, que les autres s'en rendent compte."

Elle ne sort plus que pour s'alimenter à la salle commune après un check-up complet de sa stomie et s'être assurée d'avoir récolter tout ce qui devait en sortir (à partir de 11h).

"Je ne dors plus. Je reste dans ma chambre, je regarde la télé. Vous connaissez l'émission de... de chose... ? Ca me calme. La nuit je fais pareil. Vous voulez une pate de fruit ?
- Je ne voudrai pas que ça vous manque.
- Non, non prenez-en une. J'en mange la nuit, ça m'aide à me calmer.
- Justement...
- Prenez-en une autre."


En tant que thérapeute débutant, j'ai été perplexe de cette situation pendant un moment d'une part à cause de la stomie (c'est la première personne que je rencontrais avec un tel appareillage. Même s'il est caché, il restait au centre des préoccupations de la patiente). D'autre part, elle me renvoyait un sentiment d'impuissance. Je ressentais de la frustration car j'étais moi-même envahi par ses symptômes, tellement l'angoisse pouvait être palpable. J'étais sculpté par la patiente aurait dit une systémicienne. Cela s'est paradoxalement arrangé (sa situation et mon blocage) quand j'ai surpris la patiente dans un épisode d'attaque de panique...

Debout dans la salle de bain, elle ne parvenait pas à fixer une nouvelle poche quand les produits de sa digestion ont commencé à sortir. Elle était empreinte de vertiges et de nausées. Elle criait, appelait à l'aide. Les aides-soignantes ont accourues mais elle refusait leur aide. Toutes ses portes étaient ouvertes et elle ne concevait pas de les fermer. J'ai été contraint de la soutenir moralement, depuis le couloir en lui signifiant qu'elle n'était pas seule et qu'elle pouvait prendre son temps pour se 'préparer'.

C'est là que j'ai pris conscience de l'ampleur de la souffrance psychique et physique de cette patiente mais aussi de mon incompétence dans son domaine.

Heureusement que la supervision est là pour se sentir compris et soutenu dans sa pratique car le psychologue comme d'autres professionnels est fondamentalement seul.

La faculté ne forme pas à de telles situations, elle n'en a pas les moyens et il ne faut pas attendre d'un cursus universitaire à être paré pour la pratique. C'est le jeu en quelque sorte. Du coup, j'ai dû lire, m'autoformer à la psychosomatique. Mais concrètement, le Moi-Peau d'Anzieu n'apporte qu'un support théorique à la réflexion, le QSJ de Marty sur la psychosomatique de l'adulte est très théorique pour ne pas dire clanique ce dont je me méfie souvent...
Sur le net, je suis aussi tombé sur une publication (L'image corporelle, un concept de soin). Une synthèse d'un collectif d'infirmière spécialisée dans ce concept. Lointain concept vaporeux rapidement vu en TD de L3 ou de M1... TD désincarné de toute pratique... car la psychologie est souvent enseigné hors de son enclave corporelle en respect du dualisme cartésien.
Ce collectif d'infirmière a bien compris la potentielle souffrance psycho-corporelle des patients gastro-stomisés. Effectivement, il y a un déplacement corporelle d'une fonction cachée, contrôlée (sauf problème d'incontinence) et qui, après chirurgie devient visible et surprenant (dans le mauvais sens du terme).

Maintenant, reste à mobiliser du monde autour de cette dame...


"Ne fermez pas la porte en partant s'il vous plaît."

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Anzieu D. (1985). Le moi-peau. Paris: Dunod.

Bérard, L. (1913). Titres et travaux scientifiques [Réf. image MEDIC@ : med110133x106x10x0054
Fig. XXVIII. Pharyngectomie après trachéotomie et gastrostomie préventives]. Edition : Lyon

Beyeler, S., Bigler-Perrotin, L., Donnat, N., Jaggi, K., Jonniaux, S., Laroutis Monnet, R., Lataillade, L., Lei, J., Schaerer, G., Séraphin, M.-A., Tarteaut, M.-H., Thévenot, O., & Victorion, M. (2006). L'image corporelle, un concept de soins. HUG.

Lang, F. (1931). Peter Lorre dans le film "M le maudit" [photographie]. Bildarchiv Preussischer Kulturbesitz (BPK).

Marty, P. (2014). La psychosomatique de l'adulte (7è ed.). PUF: QSJ?

mercredi 21 septembre 2016

''A chaud''... le divorce Pitt-Jolie et les enfants

Je viens d'apprendre que l'emblématique couple Pitt-Jolie allait divorcer (merci Marc Fauvelle pour l'info). Quelles est la raison officielle ? Une mésentente quant à l'éducation de leurs six enfants.


Je résume, c'est la faute des enfants si "papa et maman" divorcent.
No comment.

mercredi 7 septembre 2016

Sundur

Des envies d'ailleurs et de fraîcheur ?


Un petit tour en Islande avec Sundur, l'album du duo gémellaire Pascal Pinon, produit par Sigur Ros.
Sundur qui signifierait (d'après Google translate) : à part.
Merci Manoukian pour cette découverte !

vendredi 26 août 2016

La rentrée, un rite de passage ou un deuil des vacances ?

La rentrée scolaire approche à grand pas et comme chaque année nous subissons notre lot de marronnier journalistique (la rentrée des classes, les fournitures scolaires, les bons plans, la fin des vacances, ceux qui les prolongent etc.). Cette année, c'est malheureusement l'occasion d'aborder cette ritournelle sous un angle différent, celui du terrorisme et du risque d'attentats. Comment préparer nos plus jeunes à une intrusion armée ? Et cette obligation dérangeante mais nécessaire de simuler une attaque armée dans une école.


Je reviens vers le fond de la rentrée des classes. La forme est appelée à changer, c'est son rôle propre, la preuve cette année. Quant au fond, il est plus empreint d'éternité, de routine rassurante et ronronnante. Il a plus trait au rite qu'à l'évènement. La rentrée des classes marque un passage d'un avant (les grandes vacances autrefois associées aux travaux agricoles) et d'un après (le retour à l'instruction) accompagné de comportements préparatoires autant physique (reprendre le rythme, acheter du matériel, s'installer dans son nouvel appart') que mental (c'est la fin des vacances et donc la perte de ce mode de vie ; faut-il y voir un deuil ?).

C'est aussi la rentrée littéraire, la rentrée politique et au travail alors ?


On prépare une rentrée symbolique : on reprend les projets arrêtés, on en lance de nouveaux, la cadence va battre son plein et le système institutionnel reprendre sa marche... jusqu'à la nouvelle année et l'été suivant. N'est-ce pas rassurant au final et n'est-ce pas confortable ? Comme ces rites se produisent d'année en année, il n'y a pas de deuil possible puisqu'il n'y a pas de perte définitive.

"C'est les vacances je suis content" (ou pas, tout dépend !)
"Je reprend le travail, ça fait mal" (ou pas, tout dépend !)
"J'anticipe mes prochaines vacances" (ou pas, tout dépend !)

C'est un peu le caché-coucou des adultes pour reprendre un exemple de Cyrulnik ayant trait à la construction de la conscience de la mort chez l'enfant.

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- Cyrulnik, B. (2001). De la conscience de soi à la spiritualité. In P. Picq & Y. Coppens, Aux origines de l’humanité T2 - Le propre de l’homme. Fayard.
- Renoir, A. (1881). Marronnier en fleurs [huile sur toile]. Berlin: Staatliche Museum.
- Wilder, B. (1960). The appartment. Mirisch Company

lundi 25 juillet 2016

Une question de l'enfer

Il est un endroit au Mexique appelé Naïca à la fois éphémère et éternel.


Y travaillent dans des conditions terribles des mineurs car on y exploite de l'or, de l'argent et du plomb dans une atmosphère suffocante et moite. L'air y est tellement vicié et incompatible avec la santé que les ouvriers ont un roulement de deux heures. On descend au plus bas dans la terre à 800 m. de profondeur. Pas de chevaux pour tracter les chargements mais des machines car Germinal est derrière mais pas trop loin non plus. Des explosions, des vibrations rythment la journée de travail...
La vie humaine y est éphémère car le bourg adjacent à la montagne ne sera qu'un fantôme livré au chômage et à la migration dans un futur à venir. Il ne restera que des échoppes vide surmontés de slogans américains.


Eternelle car dans le sein de cette montagne d'apparence endormie a été découvert par deux frères mineurs plusieurs cavités exceptionnelles, telles d'immenses géodes. Chacune d'entre elles même imparfaites soient elles ont eu un intérêt scientifique important. Une en particulier, baignée dans une nappe riche en minéraux et chauffée à une température précise par le magma sous-jacent a formé au fil des siècles des cristaux géants de gypse, du jamais vu jusque-là ! Les plus grands cristaux du monde ne dépassaient pas le mètre, les plus grands de ceux-là et aussi les plus anciens en font 13 de long !


Impossible de rester longtemps dans cette géode sans y laisser la vie : 50°C. et 95% d'hygrométrie sont incompatibles avec notre nature. Une combinaison rafraîchissante et un système de respirateur est nécessaire.

Les cristaux de gypse sont une mémoire des 500.000 dernières années de la région car ils referment des pollens et des micro-organismes. Fascinant de beauté et combien fragiles, les chercheurs s'empressent de recueillir le plus d'éléments possible avant que la mine ne soit fermée. Pas de tourisme pour ne pas dégrader ce lieu. Quand les mineurs rentreront chez eux, la géode poursuivra sa croissance au fil des siècles à l'ombre de l'humanité dans un bain d'eau thermale.

Un joyau titanesque qui naît dans un environnement hostile et qui à mes yeux est une allégorie de la relation de soin. Derrière la symptomatologie se cache un être sensible qui s'oublie lui-même mais qui mérite toute notre attention.

mardi 28 juin 2016

Du rôle fondamental de la psychose dans la société vers une autre entité diagnostique

Pour faire écho à l'article de Clément Guillet (sur Slate.fr), un petit mot sur les troubles psychotiques des grandes figures religieuses fondatrices de notre société occidentale. Guillet fait état d'un article fort intéressant paru le journal américain de neuropsychiatrie et neurosciences cliniques (en PDF ici).


Les auteurs de cet article (Murray, Cunningham & Price, 2012) sont confrontés dans leur pratique à des patients psychotiques pensant posséder des dons surnaturels. Or, comme le rapportent les auteurs, comment expliciter au patient que ces symptômes psychotiques ne sont pas d'ordre surnaturel alors même que notre civilisation attribue un caractère divin à des symptômes similaires supportés par des figures religieuses révérées ? Ils se sont donc penché sur les cas d'Abraham, Moïse, Jésus et Saint-Paul dans le cadre d'un exercice diagnostique.



"Et pourquoi faire" diraient les Mudokons ?

Les auteurs espèrent ainsi que la vénération de ces figures religieuses se transfert en plus grande compassion et compréhension des personnes souffrant de troubles psychiques similaires.






N'en voulons pas (ou juste un peu) à Guillet qui s'est voulu plus psychiatre que journaliste sur Slate en titrant des diagnostics erronés et accrocheurs... Je rappelle au passage qu'un diagnostic psychiatrique reste avant tout un diagnostic médical. Un tel diagnostic est une démarche précise et scientifique d'autant plus quand les patients en questions sont décédés depuis quelques temps déjà !

Un travail très intéressant autant sur le plan historique, social, humain et médical ! Pour chaque figure religieuse sont recensés des signes ressemblant à un phénomène psychiatrique (hallucinations, idées au contenu paranoïaque, délires...) avec une liste d'hypothèse étiologique possible (épilepsie, peur etc.) et des pistes diagnostiques exhaustives. Pour Abraham sont retenues les pistes suivantes :
  • schizophrénie paranoïde
  • trouble psychotique non spécifié
  • bipolarité
  • trouble schizoaffectif (ce qui est un intermédiaire entre la psychose et le trouble de l'humeur)

Il est toutefois précisé que le seul fait d'avoir un rôle de leader dans une communauté et donc une ascendance sociale est une contre-indication diagnostique pour une psychose. Les auteurs, sur la base des théories de la distance sociale et des troubles de la communication, des modèles psychologico-politiques des relations entre meneurs et suiveurs et des comportements dans un groupe apportent des éléments de réponse à ce constat contradictoire. Ils concluent et souhaiteraient apporter une nouvelle sous-catégorie diagnostique de la schizophrénie ou de la psychose sous tendu par un continuum de la symptomatologie psychotique pour que ces figures religieuses puissent être comprise par la psychiatrie. Le très controversé DSM-V (2013) n'a pas franchi ce pas pour autant (j'en ignore les raisons).


Quoiqu'il en soit la sous-catégorie serait une variante de la supraphrénie (esprit supérieur) avec la persistance durant six mois ou plus des symptômes suivants :
  • système de pensée organisé et relativement délirant sans être bizarre pour autant
  • sentiment d'être grandiose
  • narcissisme souvent délirant
  • des hallucinations
  • un sentiment intense d'être surnaturellement sélectionné pour une mission
Chez :
  • une personne au niveau intellectuel moyen à supérieur
  • avec de fortes capacités de communication,
  • un niveau élevé de charisme (magnetic charisma),
  • la capacité de générer de l'empathie chez autrui
  • et la capacité d'entraîner, de convaincre des groupes ou des populations à suivre ses directives pour une période de temps indéfinie.
Le but de ces personnes serait en partie ou complètement basé ou inspiré par un processus de pensée psychotique. Cela produirait des pensées étroitement liées à des croyances sociales communément partagées sans être non plus raisonnable. Ces personnes devraient être habile dans le maintien de la cohésion sociale, être persuasif, influencer les autres et avoir un rang social élevé dans un tel groupe. Leurs croyances se manifesteraient dans la promulgation d'activités mortelle pour eux et le groupe et seraient donc à l'écart des normes sociales.
Seraient exclus les symptômes négatifs et de désorganisation ainsi que les troubles cognitifs.
Des troubles affectifs (dépression, anxiété, bipolarité) pourraient être associés sans pour autant affecté le fonctionnement de la personne mais plutôt être employé comme un moteur.
L'hyper-religiosité pourrait être associée fréquemment mais elle ne serait pas un critère nécessaire. Les auteurs font état d'autres système de croyances socio-politiques (extraterrestres, forces surnaturelles...).


Enfin, ces personnes devraient avoir une influence extraordinaire sur les autres et la société n'est-ce pas Dostoïevski ?

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Sources :
APA (2013). DSM-V. Washington D.C. American Psychiatric Association
da Caravaggio, M. M. (1594-1596). Le sacrifice d'Isaac [huile sur toile]. Florence: Galleria degli Uffizi.
da Caravaggio, M. M. (vers 1598). Narcisse [huile sur toile]. Rome: Galerie nationale d'art ancien.
da Caravaggio, M. M. (vers 1604). La Conversion de saint Paul sur la route de Damas [huile sur toile]. Rome: Eglise Santa Maria del Popolo.
Guillet, C. (2016). Jésus, Abraham et Moïse étaient-ils psychotiques ? Slate.fr
Holbein le Jeune (1521). Christ mort. Bâle.

lundi 20 juin 2016

Etiologie génétique du névrosisme

L'équipe dirigée par Smith, Escott-Price & Davies ont sorti une étude dont l'objectif était d'identifier les gènes en lien avec le névrosisme (trait de personnalité dont les deux pôles sont la vulnérabilité aux affects négatifs et la stabilité affective). Les auteurs de l'article (en accès libre sur ce lien) précisent que les personnes souffrant de trouble dépressif caractérisé, de trouble anxieux, d'addiction, de trouble de la personnalité et de schizophrénie ont un névrosisme élevé sur les échelles de personnalité.


Ils ont passé à la moulinette statistique les dossiers de plus de 100 000 personnes et leur ont demandés de répondre à 12 questions évaluant le névrosisme (issues du mini-questionnaire révisé d'Eysenck - EPQ-R-S) :
  1. Does your mood often go up and down?
  2. Do you ever feel 'just miserable' for no reason?
  3. Are you an irritable person?
  4. Are your feelings easily hurt?
  5. Do you often feel 'fed-up'?
  6. Would you call yourself a nervous person?
  7. Are you a worrier?
  8. Would you call yourself tense or 'highly strung'?
  9. Do you worry too long after an embarrassing experience?
  10. Do you suffer from 'nerves'?
  11. Do you often feel lonely?
  12. Are you often troubled by feelings of guilt?
Ce questionnaire rapide permet d'obtenir un score total sur 12 (un point par réponse oui). Les auteurs confirment qu'il existe une différence significative entre homme et femme sur ce trait de personnalité... au détriment des femmes (moyenne des hommes à l'EPQ-R-S=3.58, s.d.=3.19; moyenne des femmes à l'EPQ-R-S=4.58, s.d.=3.26; p=0.001). Les auteurs expliquent cette différence par des variantes génétiques, des allèles rares et/ou des modulations environnementales car ils précisent que le polymorphisme nucléotidique est similaire entre homme et femme.

Il ressort des analyses statistiques que 9 loci (emplacements sur un chromosome) sont associés à ce trait, le tout sur les chromosomes 1, 3, 4, 8, 9, 17 et 18. Sont particulièrement associés au névrosisme :
  • GRIK3 : code pour les récepteurs kaïnates réagissant au glutamate, neurotransmetteur qui a une fonction excitatrice,
  • CELF4 : code pour une protéine qui régule les excitations neuronales,
  • CRHR1 : code pour les récepteurs de l'hormone corticotrope qui intervient dans les réponses endocrinologiques, immunologiques et comportementales au stress,
  • MAPT : code la protéine Tau permettant la stabilisation des microtubules elles-mêmes responsable de transmettre le produit du neurone au sein des axones et dendrites,
  • KLHL2 : code une protéine de liaison de l'actine qui joue un rôle dans la contraction musculaire mais qui serait associée aux récepteurs de pentraxine neuronale (une autre protéine ayant pour rôle l'absorption des macromolécules synaptiques ainsi que dans la plasticité synaptique),
  • Avec prudence : PTPRD : code pour des récepteurs de la tyrosine phosphatase qui joue l'organisateur des synapses et participe à leur plasticité.
Les auteurs précisent d'ailleurs que le gène GRIK3 est le meilleur prédicteur génétique du suicide !

Cette étude est enfin un argumentaire pour que des critères biologiques soient davantage impliqué dans les systèmes de classification diagnostique en psychiatrie.

Ah ! Ils sont forts les salauds !

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Sources :
Roy, J. (1889). La grande névrose [première de couverture héliogravure]. In. J. Gerard (auteur), La grande névrose. Paris: Marpon.

Smith, D. J., Escott-Price, V., Davies, G., Bailey, M. E. S., Colodro-Conde, L., Ward, J., Vedernikov, A., Marioni, R., Cullen, B., Lyall, D., Hagenaars, S. P., Liewald, D. C. M., Luciano, M., Gale, C. R.,  Ritchie, S. R., Hayward, C., Nicholl, B., Bulik-Sullivan, B., Adams, M., Couvy-Duchesne, B., Graham, N., Mackay, D., Evans, J., Smith, B. H., Porteous, D. J., Medland, S. E., Martin, N. G.,  Holmans, P., McIntosh, A. M., Pell J. P., Deary, I. J. & O'Donovan, M. C. (2016). Genome-wide analysis of over 106000 individuals identifies 9 neuroticism-associated loci. Molecular Psychiatry (21), 749–757; doi:10.1038/mp.2016.49; published online 12 April 2016.

mercredi 15 juin 2016

Paramnésies et démarche diagnostique

"Vous êtes venu combien de fois ce matin ?
- Une seule fois Madame, vous étiez à la toilette, j'ai poursuivi mes visites et maintenant que vous êtes prêtes je viens vous voir à nouveau.
- C'est fou, je vous ai entendu trois fois. Je me suis dit, le pauvre, il est passé trois fois, il ne va pas revenir aujourd'hui."


Cette dame souffre de paramnésies, c'est à dire d'impressions de déjà-vu, déjà-vécu à différents moments de la journée et ce, depuis qu'elle est en chambre individuelle. Elle est très préoccupée par ce symptôme qui n'est d'ailleurs précédé d'aucun signe épileptique. Au MMSE elle obtient un score pathologique eu égard à son niveau d'étude et son âge. Deux médecins certifient qu'il n'y a aucun effet iatrogène. Inquiet par rapport à cet état, je demande que soit réalisé une TDM cérébrale. Cet examen met en évidence des calcifications bilatérales des noyaux gris centraux, des lésions de leucoaraïose péri-ventriculaires et des deux centres semi-ovales et d'une dilatation modérée du système ventriculaire. Le médecin annonce à la patiente que le scanner est normal étant donné son âge ; un second, gériatre, précise qu'il s'agit de lésions conséquentes à de petits AVC.

Du côté de la patiente, nous avons comme devise "je veux vivre" qui est dit de manière lancinante. Elle n'est pas dans une démarche diagnostique de ses troubles cognitifs d'autant plus qu'elle lutte contre une autre maladie invalidante et évolutive afin de maintenir le maximum d'autonomie possible. Enfin, après plusieurs entretiens passés avec elle, il s'avère que les paramnésies ne se manifestent pas lors de ses permissions (sorties à domicile). Elles apparaîtraient lors de moments de solitude et seraient probablement en lien avec son état dépressif.

En résumé, que faut-il faire ?
Ecouter la patiente et sa volonté de vivre plutôt que sortir l'arsenal de tests neuropsychologiques trop rapidement. D'autant plus qu'il n'y pas besoin de se précipiter !

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Sources :
Prud'hon, P. P. (entre 1758 et 1823). Mnémosyne [huile sur bois]. Paris: musée du Louvre.

mercredi 8 juin 2016

Bossa Nova

Un peu d'Amérique, de guitare et de rythmes avec ce bel album de reprises dont l'écoute adoucit le quotidien. On se connecte à deezer et on se met au travail.
 
 
Pauline Croze invitée chez France Inter (Si tu écoutes j'annule tout) précise qu'il s'agit ici d'un album intimiste et personnel. Des reprises jouées d'abord pour soi, pour le plaisir et aujourd'hui assumées, suffisamment (r)assurées pour les enregistrer. Du risque en somme, merci !

mardi 7 juin 2016

Biochimie et cinéma

A l'institut Max Planck (Allemagne), Jonathan Williams et son équipe (2016) ont conduit une recherche concernant les émissions chimiques du corps humains dans une salle de cinéma. Pour voir l'article en consultation libre : http://rdcu.be/iIV0 (lien permanent) paru dans Nature Scientific Reports.


L'émission biochimique la plus importante a été obtenue avec la diffusion de scènes de suspense et de comédie. Pourquoi ? D'après l'article, il y aurait un avantage adaptatif à percevoir les émissions chimiques au sein d'un groupe notamment en cas de danger (suspense) ou d'absence de danger type repos (comédie). D'où l'importance de l'émission de marqueurs chimiques.

Cette étude vient appuyer le fait que le visionnage d'un film est accompagnement au niveau olfactif et que cela peut modifier la perception qu'en ont les spectateurs. Les auteurs rappellent effectivement que le traitement olfactif vient moduler la perception des visages ainsi que le fonctionnement mnésique (récupération en mémoire à long terme).

Quel impact de cette recherche ?
- étude de l'haleine en médecine : identifier des marqueurs chimiques en lien avec le cancer mais aussi avec l'anxiété
- industries publicitaires et audio-visuelles (jeux-vidéos et cinéma) et sur les panels de consommateurs.


Cette étude me fait penser au patient cité par Didier Anzieu dans le Moi-Peau et qu'il surnomme Gethsémani (du nom du jardin d'oliviers où Jésus aurait eu des sueurs de sang avant son arrestation). Patient que le psychanalyste aborde au travers de l'enveloppe olfactive qui l'entoure et qui a une fonction de mise à distance de l'autre, d'agressivité.
 
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Sources :
Anzieu D. (1985). Le moi-peau. Paris: Dunod.
Williams, J., Stönner, C., Wicker, J., Krauter, N., Derstroff, B., Bourtsoukidis, E., Klüpfel, T. & Kramer, S. (2016). Cinema audiences reproducibly vary the chemical composition of air during films, by broadcasting scene specific emissions on breath. Nature Scientific Reports (6:25464), DOI: 10.1038/srep25464

lundi 30 mai 2016

Refus de soins

Sur le bureau traîne un dossier ayant trait à une question éthique très fréquente auxquelles sont confrontées régulièrement les soignants. Il s'agit de l'opposition aux soins, du refus de soin ou encore du négativisme.

Concrètement, je m'aperçois qu'un tel problème est latent de nombreuses situations dites conflictuelles dans la relation soignant-soigné et peut vêtir de nombreux apparats :
  • agressivité du patient (propos insultant, attaque physique ou défense physique visant l'éloignement du soignant)
  • plaintes continuelles du patient
  • souhaits contradictoires avec la fonction du soignant
  • désir de mort exprimé ou non
  • repli sur soi
  • non participation du patient lors des soins
  • perte d'autonomie...
Vous entendrez sûrement la pluripathologie neuro-psycho-somatique, psycho-neuro-somatique, somato-neuro-psychologique ou somato-psycho-neurologique de ces situations de santé. Mais vous sentirez d'autant plus la frustration d'être confronté à ce "mauvais" patient qui ne joue plus le rôle théorique et désastreux que tout soignant attend de lui c'est à dire d'attendre, de souffrir mais de ne pas se plaindre.

Etre confronté à cela sous-tend une adaptation du soignant face à une attitude vécue comme agressive car ne correspondant pas à l'axiome du soin. La relation devient ainsi compliquée, chacun se retranchant dans ses positions déclarant un état de siège mutuel. Si le climat perdure ou s'aggrave c'est à dire si le patient est suffisamment fort pour ne pas céder son territoire et son bout de gras, il est fait appel à un enchanteur, un paysagiste, un négociateur, un professionnel de la suggestion, de la communication, un régulateur, un salvateur, un rebouteux, un extra-terrestre... bref à un psychologue. Qu'est-ce que le corps soignant attend de lui dans un pareil cas ? La plupart du temps, une réponse toute faite, une solution et peut-être de conformer le patient à un idéal. Le psychologue fort d'un réalisme frisant le défaitisme est donc pris à parti entre des souhaits contradictoires, la volonté d'apporter un peu de sérénité dans les rapports humains, de porter le discours du patient récalcitrant à une équipe épuisée, usée qui ne sait plus quoi faire car la souffrance éthique est là au quotidien. Le psychologue est là entre deux parties en souffrance aigüe. Le lien entre elles est presque rompu.

Le psychologue rentre dans son bureau et commence à étudier la demande, ses tenants et ses aboutissants. Il va s'entretenir avec le patient qui n'en peux plus de vivre, s'est perdu quelque part dans le temps où il avait confiance en lui, où son sentiment d'efficacité personnelle était acceptable. Effectivement, une hospitalisation pour syndrome de glissement, dépression, bref une déchéance est arrivée mais lui aurait voulu rester chez lui, pour y finir ses jours. Il a donc été arraché de ce marasme confortable et a vécu ce déracinement comme un acte de violence. Le temps a passé et la question s'est posé que devons-nous faire de ce patient, célibataire endurci, sans descendance ? Une mise sous tutelle puis un placement en EHPAD est préconisé. Lui, était d'accord, de toute façon résigné et apathique.


"Je voudrai qu'on me foute la paix. Je n'ai pas envie de me lever le matin, je veux dormir tranquille. Je veux mourir, c'est finit pour moi."


Le psychologue est confronté pour la première fois à un patient qui exprime aussi clairement son détachement. Il se débat physiquement contre la vie en lui, bientôt 93 ans, une énergie incroyable et débordante. Le résistant de 39-45 est là. Un (insipide) MMSE à 28/30, c'est rare !
Le psychologue, éternel débutant, n'est pas plus avancé. Comment ce patient veut-il refuser ce qu'il a de plus précieux en lui ? C'est du sabordage ! Quel sens cela peut-il avoir ? Il retourne sa pulsion de vie contre lui-même, c'est un suicide camouflé. Ainsi, le psychologue est embarqué avec l'équipe dans un mouvement intolérable pour lui-même, et vit par procuration la frustration de l'équipe. Le psychologue monte sur les épaules de son idole. Que dirait la voix d'Ameisen, suave, délicieuse et rassurante ? Va chercher ! Dans son bureau, il ressort les avis publiés par l'ancien espace national de réflexion éthique sur la maladie d'Alzheimer (aujourd'hui EREMAND) et du comité consultatif national d'éthique (CCNE). Il se décide à organiser une réflexion éthique avec l'équipe dont les objectifs seraient de trouver un compromis entre les souhaits du patients et les souhaits des soignants, mais avant de comprendre la position de soignant, de comprendre le vécu du patient qui au fond n'accepte probablement pas sa perte d'autonomie et surtout son placement en EHPAD...

La réflexion est menée : la situation ne pose pas un si grand problème que cela. Depuis quelques temps, le patient prend des initiatives et s'ouvre avec plaisir à la communication (moment des repas). Finalement la situation s'arrange doucement, il est décidé d'adapter le plan de soin et de ne pas lui proposer une toilette complète en systématique, juste de se contenter d'une toilette intime quotidienne et nécessaire. Les deux camps ont finalement ouvert des portes et des liens se sont été créés pour un projet mutuel. Serait-ce du soignant-soignant ?


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Sources :
Ferrey, G, & Taurand, P. (2012). Oppositionnisme, négativisme et attitudes de refus du sujet âgé. Place du refus de soin. EREMA.
Quignard, E. (2011). Le refus de soins en gériatrie. EREMA.
Robert, H. (1797). Cascade sous un pont en ruine [huile sur toile]. Tours: musée des beaux-arts.
Taurand, P. (2010). Maladie d'Alzheimer et renoncement. EREMA.

jeudi 19 mai 2016

De la toile au bureau

En cette période propice au cinéma (festival de Cannes ou de connes dixit C. Vanhoenacker, 18/05/2016 dans son émission de l'après-midi sur France Inter) je tenais à partager quelques découvertes entre l'art et la psychiatrie/psychologie. Je ne souhaite pas ici fournir une analyse exhaustive toujours délicate en l'absence des intéressés, d'autres l'ont fait avant moi, il s'agit juste de stimuler agréablement notre mémoire sémantique et d'éveiller notre curiosité artistique.

Deux films de Provost l'un traitant de Séraphine Louis dite de Senlis et le second de Violette Leduc.

En quelques mots, Séraphine est peintre et le film évoque son quotidien, sa manière de travailler (pigments fait-maison) et son accès à la "célébrité", source de décompensation. Violette aborde quant à lui l'écrivain Violette Leduc, la relation mère-fille, l'homosexualité, la censure littéraire, ses relations avec Simone de Beauvoir.

Deux films avec Isabelle Adjani, pas uniquement pour sa beauté :
L'histoire d'Adèle H., diariste aborde l'érotomanie dévorante de la seconde fille de Victor Hugo, l'écrivain. Camille Claudel traite de cette sculptrice, amante d'Auguste Rodin sculpteur, sœur de Paul Claudel, écrivain et nous plonge dans les tourbillons de ses passions.

Encore un peintre : Van Gogh. 
Un film dans la lenteur, dans la douce descente de la dépression, de l'autodestruction.

Autrement : un inclassable à mon niveau de profane, sidérant et dans un mutisme quasi total, autour du fameux tableau de Bruegel l'Ancien. Attention, il faut savoir se laisser aller. Il demande un petit effort d'adaptation.

mardi 17 mai 2016

Ouverture

FIP en fond sonore ce matin diffuse "Sweet dreams" par Senor Coconut. Un titre approprié
Ouvrir un blog autour de mon job. Pourquoi pas ? Mon inquiétude principale est celui de la fidélité à long terme. Pourrai-je m'y tenir ?