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vendredi 2 juin 2017

Spirale et tremblements

Depuis le début de la pratique, je relève chez certains patients des tremblements à l'écriture notamment lors de la passation du MMSE ou encore des micrographies. Mais là, un tremblement uniquement en copie de figure et absent de l'écriture, je n'avais encore jamais vu !


WTF?!

La photo de la phrase étant tremblante, elle a subi une petite amélioration de netteté sous gimp.
Je m'interroge aussi sur mon cas...

A la recherche d'outils d'évaluation des tremblements j'accoste sur le site d'une association inconnue au bataillon, l'APTES (Association des Personnes concernée par les Tremblements Essentiels, sans trembler c'est par là), puis sur Amélie santé qui traite aussi du sujet ici. Professeur Broussolle a donc rédigé pour le compte de l'APTES un article fort intéressant sur le sujet étayant les différents tests pour repérer différents types de tremblements (d'attitude, d'action ou de repos Parkinsonien).

Le test de la spirale serait couramment employé et il pourrait apporter un diagnostic différentiel entre le tremblement essentiel et le tremblement psychogène à en croire une étude du Baylor College of Medicine (disponible ici).

Je constate les amplitudes maximales suivantes :
  • RAS en position du serment
  • ~3-4 mm en posture du bretteur
  • ~2-3 mm à l'épreuve doigt-nez sans aggravation les yeux fermés
  • RAS au cou
  • RAS à la tête
  • pas de tremblement de repos sans aggravation en épreuve de mémoire de travail
  • dessin de la spirale : 3mm de déviation maximale
En copie

En suivi de tracé.
  • test du verre d'eau : RAS
  • test avec deux verre d'eau à transvaser : RAS à gauche, tremblement léger (1-2 mm. sur le mouvement de bascule) à droite, pas d'eau de renversée
Bon rien d'aussi tremblant que ce que le poster d'Aguilar et al. (2008) montre à voir. Je serai tenté d'écarter l'hypothèse du tremblement essentiel. Celui de la patiente est présent selon le moment. Or, ma chère patiente est traitée par de la Cordarone... qui a pour effet indésirable fréquent le... tremblement ! Et... la patiente se dit stressée par l'évaluation neuropsychologique. Et elle n'est pas gênée par cela au quotidien. So what ? Iatrogène ou psychogène ?

Allo doc ?

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Aguilar Tabora, L. G., Davidson, A., Jankovic, J., & Ondo, W. G. (2008). Characteristics of Archimedean spiral drawing in patients with psychogenic tremor. Neurology, 70(11 Suppl 1):A390-1.

jeudi 30 mars 2017

Et ta démence, elle se transcrit comment ?

Une revue de questions (Delgado-Morales & Esteller, 2017 ; disponible sur ce lien) vient de paraître concernant les processus neuroépigénétiques impliqués dans les principales maladies neurodégénératives (maladies d'Alzheimer et de Parkinson, démences à corps de Lewy et fronto-temporales). Celles-ci sont considérées par les auteurs comme émergeant d'un spectre de troubles cognitifs. Ils rappellent que l'âge est le facteur de risque le plus important pour ces maladies. En conséquence de cause, leurs incidences respectives vont se majorer avec l'accroissement de l'espérance de vie.


Par exemple, l'accumulation de béta-amyloïdes censé être un indicateur de maladie d'Alzheimer est aussi observée dans la démence à corps de Lewy. Il en est de même pour l'hyperphosphorylation de la protéine Tau et l'inclusion d'alpha-synucléine retrouvées dans la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson et la démence à corps de Lewy !


En quoi est-ce étonnant ?
Nous sommes bien loin de la facile et nette distinction entre pathologies sur la base moléculaire ! C'est pour ça que les autopsies post-mortem trouvent autant de mixité moléculaire ! Malgré leurs différences sur le plan clinique, elles ont en commun des altérations au niveau moléculaire. C'est à dire que le processus pathologique est identique dans un premier temps et qu'il diverge et se spécifie au fur et à mesure de la progression de la maladie. L'hypothèse retenue par les auteurs (LEARn) est que des altérations épigénétiques au cours de la vie pourrait perturber la transcription à long terme de certains gènes. Le cumul de ces altérations serait comme une graine des maladies neurodégénératives.

Et puis quoi encore ?
Comme dans beaucoup d'étude, il faut poursuivre les recherches. Et bien poursuivez car c'est passionnant !

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Sources :
Delgado-Morales, R., & Esteller, M. (2017). Opening up the DNA methylome of dementia. Molecular Psychiatry, 22, 485-496.

mercredi 15 juin 2016

Paramnésies et démarche diagnostique

"Vous êtes venu combien de fois ce matin ?
- Une seule fois Madame, vous étiez à la toilette, j'ai poursuivi mes visites et maintenant que vous êtes prêtes je viens vous voir à nouveau.
- C'est fou, je vous ai entendu trois fois. Je me suis dit, le pauvre, il est passé trois fois, il ne va pas revenir aujourd'hui."


Cette dame souffre de paramnésies, c'est à dire d'impressions de déjà-vu, déjà-vécu à différents moments de la journée et ce, depuis qu'elle est en chambre individuelle. Elle est très préoccupée par ce symptôme qui n'est d'ailleurs précédé d'aucun signe épileptique. Au MMSE elle obtient un score pathologique eu égard à son niveau d'étude et son âge. Deux médecins certifient qu'il n'y a aucun effet iatrogène. Inquiet par rapport à cet état, je demande que soit réalisé une TDM cérébrale. Cet examen met en évidence des calcifications bilatérales des noyaux gris centraux, des lésions de leucoaraïose péri-ventriculaires et des deux centres semi-ovales et d'une dilatation modérée du système ventriculaire. Le médecin annonce à la patiente que le scanner est normal étant donné son âge ; un second, gériatre, précise qu'il s'agit de lésions conséquentes à de petits AVC.

Du côté de la patiente, nous avons comme devise "je veux vivre" qui est dit de manière lancinante. Elle n'est pas dans une démarche diagnostique de ses troubles cognitifs d'autant plus qu'elle lutte contre une autre maladie invalidante et évolutive afin de maintenir le maximum d'autonomie possible. Enfin, après plusieurs entretiens passés avec elle, il s'avère que les paramnésies ne se manifestent pas lors de ses permissions (sorties à domicile). Elles apparaîtraient lors de moments de solitude et seraient probablement en lien avec son état dépressif.

En résumé, que faut-il faire ?
Ecouter la patiente et sa volonté de vivre plutôt que sortir l'arsenal de tests neuropsychologiques trop rapidement. D'autant plus qu'il n'y pas besoin de se précipiter !

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Sources :
Prud'hon, P. P. (entre 1758 et 1823). Mnémosyne [huile sur bois]. Paris: musée du Louvre.