mardi 20 décembre 2016

Gastrostomie et trouble anxieux (la suite)

Je fais suite à mon précédent article sur la dame anxieuse. Pour faire court, le symptôme d'anxiété s'est résorbé. Par contre difficile d'identifier le facteur de réussite parmi tout ce qui s'est mis en place pour elle :
  • facteur environnementaux :
    • une nouvelle voisine de chambre foncièrement extravertie qui la considère comme la sœur de sa belle-mère
    • une autre voisine de chambre pour qui la dame avait travaillé dans sa jeunesse
    • une distribution rassurante des poches de gastrostomies
  • facteur psychothérapeutique :
    • une séance d'hypnothérapie
    • des séances de soutien psychothérapeutique dans un environnement bruyant afin de stimuler son contrôle attentionnel, librement inspiré des travaux de Robinson et al. (2016 ; en cliquant sur ce lien)
  • facteur médicamenteux :
    • un anxiolytique en systématique
Aujourd'hui, elle est plus détendue, souriante et élabore spontanément de petits projets afin d'améliorer son quotidien ce qui est significativement remarquable !

Tout cela, c'est la forme. Finalement nous avons réduit le trouble du comportement perturbateur mais le fond d'anxiété, lui, est toujours là et bien ancré.

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Robinson, O. J., Krimsky, M., Lieberman, L., Vytal, K., Ernst, M., & Grillon, C. (2016). Anxiety-potentiated amygdala–medial frontal coupling and attentional control. Translational Psychiatry (2016) 6, e833; doi:10.1038/tp.2016.105.

Se faire violence dans le soin

Je rebondis sur un article de Ciccone (2009) intitulé "Faire violence sous prétexte de soigner". Article parcouru pour étayer une situation où l'équipe risque l'épuisement face à un patient désinhibé, impulsif, agressif et autoritaire avec dans ses antécédents une bipolarité et une personnalité paranoïaque. Je serai presque tenté de renommer l'article avec un réflecteur de la troisième personne mis entre parenthèse : "(Se) faire violence sous prétexte de soigner."

"Ce n'est plus un humain, on dirait un animal... Je n'en peux plus, il va nous rendre folle."

L'autre n'existe plus. Seule l'expression de la pathologie est perçue.

Il faudrait très certainement y voir l'affect de honte des soignants que Ciccone origine lors de la rencontre avec la pathologie. D'après lui, la honte provient d'une confrontation entre l'horreur du handicap, de son inhumanité et de l'idéal professionnel. Comme M. est opposant ou autoritaire, c'est selon, il est presque impossible de le satisfaire pleinement et par là même pour les soignants d'être satisfaits de leur soin. Le risque dans ce cas est de voir émerger la haine et la rétorsion du soignant à l'égard de cet homme. Je crains que certains membre de l'équipe non qualifiés aient déjà basculé dans la rétorsion pour répondre à la violence que fait vivre le patient.

Une force est à souligner toutefois, l'équipe est solidaire et est dans la recherche de l'élaboration car me sollicite régulièrement. "Seule l'élaboration suffisante de la haine permet que la réponse du soignant soit une réponse aux besoins du patient" (Ciccone, 2009). D'où la nécessité, même en EHPAD (annexe de la gériatrie), d'une supervision d'équipe régulière.
Il faut dire que Ciccone était là au bon moment car je commençais à être moi-même sidéré par l'effroi et l'impossible soin à donner.


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Arcimboldo, G. (1573). L'hiver [huile sur toile]. Paris: musée du Louvre.
Ciccolo, A. (2009). Faire violence sous prétexte de soigner. In S. Korff-Sausse (ed) La vie psychique des personnes handicapées (pp 197-205). érès

mercredi 30 novembre 2016

Cognition de la spiritualité

Il s'agit ici d'un article-bouteille à la mer car une colle m'a été posée et je n'ai pas été foutu d'y répondre... c'est le but de la colle quoique l'intention initiale du colleur n'était pas de me coller.


Où se situe la spiritualité sur le plan cognitif ? Les capacités cognitives rattachées aux croyances sont-elles maintenues dans le vieillissement pathologique ?

Je reformulerai la première question en : "A quelles fonctions cognitives pourraient bien se rattacher la croyance ?" Spontanément je répondrai aux raisonnement (mémoire de travail et système de contrôle exécutif), émotion, praxie, mémoire épisodique et procédurale, langage et compréhension, compétence sociale et empathie... Je répondrai que c'est une capacité qui fait appel à l'ensemble du système cognitif. Pour étayer cette réflexion, j'ai cherché des articles scientifiques sur la cognition de la spiritualité sans trop de succès. Et puis dans ce type de recherche on a vite fait de tomber sur des sites douteux. D'autant plus que les bouquins en ma possession n'évoque pas cette problématique. Il est très succinctement survolé la notion d'hyper-religiosité que je crois associée à la psychose et au syndrome dysexécutif cognitif. La paléontologie fait le constat que la spiritualité est toute particulièrement associée au développement cortical de l'espèce humaine (conscience de la mort, rites funéraires)... sauf que les éléphants, certains oiseaux, les fourmis, ont elles aussi des comportements que je qualifierais faussement d'anthropomorphe lors des rites funéraires qui leur sont propre. Faussement anthropomorphe car pourquoi attribuer ces compétences à l'humanité alors qu'on les retrouve dans d'autres espèces ? Je m'égare.

Quant à la seconde question... Je n'en sais rien et serais tenté de dire que les habitudes de vie-rituels perdurent tout comme les croyances. Ce qui importe est ce qui fait sens à la personne âgée même sévèrement démente.

Si vous avez des pistes de réflexions sérieuses à apporter, je vous laisse commenter et apprécierais un échange sur cette colle.

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Friedrich, C. D. (vers 1834). Les étapes de la vie [huile sur toile]. Leipzig: Museum der bildenden Künste.